dimanche, 02 octobre 2022 09:21

L'ACADÉMIE MARQUISIENNE AU 12ÈME COLLOQUE DE LINGUISTIQUE OCÉANIENNE A L'UPF (05-09/09/2022)

COMPTE-RENDU PUBLIC DU COOL12 À L’UPF (05-09/09/2022)

Le 12ème colloque de linguistique océanienne (COOL12) s’est tenu à l’UPF (Université de Polynésie française) du lundi 5 au vendredi 9 septembre 2022. À l’invitation d’un des organisateurs du colloque, Jacques Vernaudon, linguiste, enseignant-chercheur à l’UPF, Toti Teikiehuupoko, directeur de l’Académie marquisienne, a participé aux nombreuses interventions des linguistes de la zone Pacifique ; il était accompagné de deux membres de l’Académie de Nuku Hiva : Teautapi Teikitekahioho, académicien, et Jacques Iakopo Pelleau.

Lundi 5 septembre 2022

Les membres de l’Académie sont présents sur place dès 7h30 ; ils assistent aux cérémonies d’inauguration de l’évènement : accueil dans le hall du grand amphithéâtre, coutume présentée par la délégation de Nouvelle-Calédonie, discours du président de l’UPF et du Ministre de la Culture du Pays, assisté de la Ministre de l’Éducation ; les cérémonies d’inauguration officielle se poursuivent dans le grand amphithéâtre désormais ouvert à tous.

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Les 3 membres de l’Académie marquisienne salués par Mike Tessier, auteur-compositeur
et membre du service interprétariat du Ministère de la Culture du Pays.

Les interventions des linguistes commencent dès 9h00 conformément au programme établi
dont on peut suivre la progression en cliquant sur ce lien
;

Comme son nom l’indique, l’Université touche au côté universel de la connaissance ; c’est donc un lieu d’ouverture sur le monde, et l’un des objectifs du colloque est de permettre aux chercheurs-linguistes, la plupart enseignants-chercheurs, de présenter le résultat de leurs travaux au reste de la communauté scientifique, puis de répondre aux questions.

Les présentations sont donc très variées et aussi très pointues, souvent traitant de langues inconnues de la plupart des non spécialistes, et parfois centrées sur un aspect très restreint de ces langues. De plus, comme on le voit sur le programme, de nombreuses interventions sont en anglais, sans traduction simultanée, ce qui nécessite une forte attention du public.

Restitution des archives audio et vidéo de l’Académie marquisienne

En 2019, l’Académie avait confié ses archives sonores et vidéos analogiques à un organisme australien qui devait se charger de les restituer après numérisation. Cet organisme est basé à Melbourne et se nomme PARADISEC (Pacific and Regional Archives for Digital Sources in Endangered Cultures).

Ce lundi, profitant de la pause méridienne, par l’intermédiaire d’un de Jacques Vernaudon, Toti Teikiehuupoko, reçoit des mains de Nick Thieberger, professeur à l’Université de Melbourne et représentant PARADISEC, la restitution des enregistrements originaux et de leur numérisation sur un clé USB contenant 44Go de données qui seront bientôt rendues publiques.

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Photo personnelle : De gauche à droite, Teautaipi Teikitekahioho,
Jacques Vernaudon, Nick Thieberger, Toti Teikiehuupoko et Jacques Iakopo Pelleau

Les interventions se poursuivent jusqu’à 18h00 ; elles portent principalement sur les techniques de numérisation des textes anciens des langues polynésiennes, et particulièrement du tahitien.

Au journal télévisé du soir, Polynésie 1ère a diffusé une courte interview de Toti Teikiehuupoko, directeur de l’Académie que l’on regarder ci-après :



Mardi 6 septembre 2022

Les membres de l’Académie sont de retour à l’Université afin d’assister aux interventions des linguistes qui reprennent dès 8h00. Dans la journée, ils sont rejoints par Jenna Vevehei Hapipi, intégrée à l'Académie en mai en qualité de remplaçante des académiciennes de Fatu Iva ; elle a été présente à nos côtés aussi souvent que son emploi du temps universitaire le lui permettait.

Deux d’entre elles apportent un éclairage nouveau sur le peuplement de la Polynésie au sens large.

En bref, en descendant de la Papouasie-Nouvelle Guinée, les peuples migrants sont passés par les îles Salomon et le Vanuatu pour se fixer aux Tonga et Samoa avant de reprendre leur route vers l’est au terme d’une longue période. D’autres cheminements semblent se faire jour désormais.

a) – Il apparaît aux spécialistes de la flore que certaines plantes des Marquises ne se rencontrent ni aux Samoa, ni à Tonga, mais proviennent d’îles plus à l’ouest ; les ancêtres des Marquisiens viendraient-ils alors aussi de ces îles-là ?

b) – Grâce aux traces laissées par les migrants polynésiens, les chercheurs ont découvert que la migration d’ouest en est ne s’était pas déroulée par étapes et linéairement mais avec de nombreux allers-retours et détours vers des îles différentes ; certains suggèrent que, partis d’îles hautes, certains migrants arrivés aux Tuamotu ont été déconcertés de ne pas y trouver de vallées et de rivières, et qu’ils auraient repris leur route en quête de terres plus accueillantes.


Jeudi 8 septembre 2022

À 8h30, la première présentation de la journée s’intéresse à la légende de Fai, la raie, recueillie à Hiva Oa en 1898 par Karl von den Steinen ; elle est faite par Michael Koch, chercheur indépendant, et traite de « l’interaction et de la transformation de l’homme, des animaux et des plantes dans la mythologie marquisienne, parfois même exprimée au travers d’objets matériels, afin de montrer comment la connaissance des écosystèmes se manifeste et comment elle a été transmise de génération en génération. »

À la fin de cette présentation, la seule du colloque traitant spécifiquement de la langue marquisienne, Toti Teikiehuupoko, directeur de l’Académie marquisienne, prend la parole afin d’inviter les chercheurs et le public à consulter le site dédié dans le but de s’initier à la graphie liée choisie en 2001 par les « tuhuka èo ». Il attire ensuite l’attention des linguistes sur leur fâcheuse habitude à classifier la langue en deux zones linguistiques : la langue des trois îles du nord et celle des trois îles du sud ; il rappelle l’unité syntaxique de la langue et l’intercompréhension quasi-totale des Marquisiens qui contredit cette théorie.

L’intervention de Toti est traduite en anglais par Jacques Iakopo Pelleau ; Jacques Vernaudon répond à Toti. On peut regarder la totalité de la présentation et des questions-réponses dans la vidéo ci-après.



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1ère photo : intervention de Toti ; 2ème photo : traduction anglaise de Iakopo

La journée se poursuit par une série de présentations en français et/ou en anglais concernant :

*- Les différents noms des poissons de Polynésie française, et toutes les variations de ces noms, les écosystèmes océaniens, l’interaction entre les humains et les éléments de la nature dans le vocabulaire.

*- L’évolution des mots et des toponymes selon les pays et les époques, leur adaptation au pays.

*- La journée se termine par une table ronde dont le sujet était les écosystèmes insulaires mais, très rapidement l’échange a dérivé sur le risque de perte des langues dans les divers archipels ; Toti Teikiehuupoko faisait partie des personnalités invitées à siéger face au public.


Vendredi 9 septembre 2022

*- La matinée est dédiée aux langues du Vanuatu, de Fidji et de Nouvelle-Calédonie.

*- Au cours de cette matinée, de 10h à 11h, Jacques Iakopo Pelleau est invité par le journaliste Pascal Mitote de Polynésie 1ère radio à participer à l’émission « Te Hono maòhi » afin de faire le point sur les apports du colloque linguistique à l’UPF ; on peut consulter cette émission en regardant la vidéo ci-après.



*- L’après-midi est centrée sur les langues paùmotu et tahitienne (particulièrement le tahitien du XVIIIème siècle), avec un sujet sur les textes de Henri Hiro.

*- Il y a aussi une intervention très pointue sur les différentes façons dont les étrangers écrivirent les langues polynésiennes selon la phonologie de leur propre langue, ce qui rend difficile la reconstruction de certains mots.

*- La session se termine par une table ronde concernant les chants dans les langues polynésiennes avec la présence au pupitre de chanteurs tahitiens, de compositeurs de chants pour le Heiva, de Flora Devatine et de deux linguistes-chanteurs de Nouvelle-Calédonie ; ces derniers avancent que les paroles des chants dont la signification, souvent ancienne, est inconnue sont parfois des onomatopées, parfois des mots destinés au monde des « invisibles », les esprits des ancêtres. De même, ils expliquent comment les ronflements pendant le sommeil est un mode de communication avec ce même monde…

Concernant notre époque, on constate que de nombreux jeunes compositeurs pensent et écrivent d’abord en français avant de traduire en langue polynésienne leur chansons qui manquent alors d’authenticité.

On déplore aussi la disparition des chants correspondant aux différentes parties de la nature : les rivières, les plages, les embouchures, les sources, l’eau vive, les arbres, la fabrication des grands tapa qui nécessitait de l’espace, toutes sortes de pêche…

La séance se termine par une série de remerciements ponctués de chants repris par tous.

Le 12ème Colloque est clôturé par un cocktail auquel participent les intervenants et les invités.

Les membres de l’Académie marquisienne rejoingnent la Terre des Hommes le dimanche 11 septembre 2022.

 

 

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